Communiqué du 17 septembre 2021

Très chère Smart City

Alors que l’état des finances de la ville avait servi d’argument pour l’abandon de la gratuité des transports scolaires et guide la mutualisation des emplois municipaux, nous avons été fort surpris.es de voir apparaître un projet de Smart City budgété 40 000 000 d’€ dans l’ordre du jour du dernier conseil municipal. A notre question sur la part du financement qui reviendrait à la ville, il n’y a pas eu de réponse. Concernant les services rendus à la population, le 1er adjoint s’est exprimé : une application nous permettra de trouver la place de parking ou la poubelle disponible la plus proche… Il ne nous paraît pas nécessaire de faire un tel investissement pour s’apercevoir qu’il y a un immense parking vide à l’entrée de la ville ou que les poubelles ne sont pas assez nombreuses ou encore que les bornes de collecte des déchets ménagers ne sont pas suffisamment souvent vidées.
L’idée que sous-tendent les Smart City est celle d’une adaptation du territoire aux besoins de habitant.es. Un premier écueil nous paraît se présenter ici. Le territoire ne pourra s’adapter qu’aux besoins de celles et ceux qui fourniront des données numériques. Ne risque-t-on pas alors de renforcer les inégalités, d’invisibiliser voire de marginaliser les besoins des personnes les moins bien équipées ou dont les compétences dans le domaine sont les plus limitées ? Le développement des services en ligne comporte un deuxième risque : la destruction d’emplois publics. Nous ne nous opposons pas à ce que de nouvelles démarches en ligne se développent. Cela simplifiera très certainement la vie de beaucoup de gens mais nous veillerons à ce que cela ne détruise pas l’accueil physique des usager.es. Le troisième risque qui nous apparaît concerne l’usage qui pourrait être fait des données collectées. Dans un pays où les services publics auraient conservé leur identité spécifique, une méthode de traitement égalitaire des usagers, l’utilisation des connaissances acquises sur les habitant.es ne poseraient peut-être pas de problème. A l’heure où des méthodes de management issue du privée s’insinuent dans les collectivités, où les services sont mis en concurrence entre eux et avec des entreprises, les dispositifs liés à la Smart City pourraient finir par s’apparenter à des formes de publicité ciblée. Enfin, nous craignons que tout cela n’aboutisse à des possibilités de contrôle que ne devraient pas posséder les collectivités.
La ville connectée pourrait avoir des aspects positifs, liés à la diminution de la consommation d’énergie, à une fluidification des déplacements, etc. Sans rejeter les nouvelles technologies numériques, nous pensons que l’intelligence ne se manifeste que quand des humains sont en mesure de les maîtriser et de les modifier. Les algorithmes n’ont pas d’éthique et n’ont pas d’explication à fournir lorsqu’ils se trompent, c’est pourquoi, ils ont tendance à susciter des sentiments d’injustice quand on les laisse gérer les humains de manière autonome. Celles et ceux dont les enfants sont triés chaque année sur Parcoursup savent bien de quoi il est question.